Verdun / Le mémorial se reconnecte avec la forêt

Autour de l’extension architecturale du mémorial de Verdun conçue par l’agence Brochet Lajus Pueyo, le paysagiste Let’s Grow a réinséré le monument dans la forêt plantée après le conflit. La réouverture publique du site, le 21 février 2016, lancera les 300 jours du cycle commémoratif « Verdun 2016 ».

Trois périmètres structurent l’insertion paysagère du mémorial de Verdun. Aux abords immédiats du monument, un talus de grosses pierres interprète l’idée de dislocation : « Nous avons refusé de pasticher les tranchées par une fausse reconstitution », insiste Pierre Dabilly, paysagiste de l’agence bordelaise Let’s Grow. L’évocation abstraite du cauchemar se justifie d’autant plus que contrairement à l’ossuaire de Douaumont, le mémorial ne met pas le visiteur au contact direct de la mort.

Plus loin, la route départementale d’accès suit un nouveau tracé plus éloigné du monument, pour conduire au parking rendu d’autant plus discret que l’ancienne liaison directe avec le mémorial a disparu : le visiteur pénètre désormais dans le monument par un accès souterrain, d’où il émerge peu à peu pour dominer le champ de bataille.

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Lisière d’une forêt d’exception
Enfin, les plantations du troisième cercle, inspirées par les essences typiques des lisières lorraines, ménagent la transition avec la forêt de Verdun, labellisée « forêt d’exception » en raison de son histoire singulière : après la guerre, l’urgence des besoins de bois avait conduit à la plantation de 28 millions d’arbres en six ans, sur l’ancienne ligne de front.

Complémentaire de l’intervention du paysagiste, les abattages mis en œuvre par l’Office national des forêts (ONF) restituent la topographie du champ de bataille. « Nos discussions avec l’exploitant de la forêt nous ont conduits à privilégier les végétaux locaux », souligne le concepteur. Sur une emprise totale de 14 000 m2, l’intervention de Let’s Grow a intégré la plantation de 132 arbres, de 2 300 m2 de massifs arbustifs, 4 500 m2 de pelouses et prairies fleuries, ainsi que l’aménagement de 70 places de voitures et 9 places de bus.

 

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Rupture esthétique
Plus de cinq ans après le concours qu’il a remporté dans l’équipe pilotée par l’agence Brochet Lajus Pueyo, Pierre Dabilly mesure le chemin parcouru et garde en mémoire la triste impression de sa première visite : « Une route surdimensionnée conduisant à un parking sans arbre, traité comme une mer de bitume, des haies coupées au cordeau, sans rapport avec l’enjeu »…. Face aux complexités inhérentes à la diversité des intervenants – en particulier le comité national du souvenir, maître d’ouvrage, le département de la Meuse et l’ONF – Pierre Dabilly souligne « le rôle formidable de la SEBL, maître d’ouvrage délégué, pour tenir le projet dans la durée ».

 

 

Du temps au temps
Embarqué dans l’équipe de maîtrise d’œuvre grâce à des habitudes de travail avec l’architecte mandataire sur des projets de logement, le dirigeant de Let’s Grow a trouvé dans ce projet l’occasion de revenir au thème de la mémoire qui a contribué à inspirer sa vocation : en 2004, il a soutenu son projet de fin d’études à Bordeaux sur la recomposition paysagère d’un cimetière de Tours. Quelques années de pousse restent nécessaires à la pleine lisibilité de la composition exécutée par l’entreprise locale Meuse Paysage.

Source: Le Moniteur