Mort du paysagiste Jacques Wirtz

Le paysagiste Jacques Wirtz est mort le 21 juillet 2018, à l’âge de 93 ans. Jacques Wirtz a été l’un des principaux paysagistes belges du XXe siècle, et il a exercé une influence certaine sur les générations suivantes.  

Vers 1948, il a commencé un tour de porte à porte, offrant des services d’entretien et de construction à Schoten et dans les environs. Le soir, il dessinait à la maison. C’est ainsi qu’il a bâti son entreprise : pierre par pierre, le premier ouvrier, le premier camion, etc. Le marché et la politisation de la Belgique l’orientent vers le secteur privé, dans lequel il a développé son style avec une grande liberté et a beaucoup expérimenté. Mais dans les quelques travaux publics qu’il pouvait réaliser, il excellait. Il était très dévoué au Cogelspark à Schoten et au Bremweide à Deurne en 1970. Dans la Fruithoflaan à Berchem et le campus universitaire à Wilrijk, l’ancienne UIA, il était aussi très original. Il voulait donner des oasis de fraîcheur et de tranquillité à tous ceux qui n’ont pas de jardin.

À partir de 1968, avec le jardin devant le pavillon de l’Exposition universelle d’Osaka, sa réputation a commencé à se développer à l’étranger. Les travaux autour de Genève, de la France, de l’Espagne, du Japon et des Pays-Bas ont été ses premiers pas. En remportant le concours des Tuileries à Paris en 1990 et la commande des jardins de l’Elysée, il est soudain découvert par la presse internationale.

C’était vraiment un caméléon stylistique, qui pouvait faire ses preuves dans tous les environnements, en s’appuyant sur une intuition totale. La sensation spontanée et la réponse intuitive sont essentielles dans son travail. Il a su oser penser dogmatisme et sectarisme. Il a trouvé que l’idéologie de la glorification des plantes indigènes était claustrophobe, peu pragmatique, ridicule et totalement hors de propos. Il était très concentré sur plus de verdure, moins de trottoirs, abritant l’ombre et l’absence de spectacle. Il pensait que c’était la vraie bataille !

En raison de la pression du travail à l’étranger, l’entreprise a été scindée entre le bureau d’études Wirtz Tuinarchitectuur et le bureau d’études Wirtz International.. Deux fils l’ont rejoint pour renforcer l’entreprise et la continuer plus tard. Pendant 26 ans, ils ont travaillé côte à côte. Il leur a laissé une liberté totale et les a envoyés ou conseillés quand c’était nécessaire. Ses connaissances pratiques étaient inépuisables, et sa curiosité pour les nouveaux matériaux ou les plantes brûlait sans cesse.

Il a continué à travailler à plein régime jusqu’en 2010, alors qu’il avait 86 ans. Son œuvre tardive témoigne d’une grande audace et d’une liberté absolue. Il disait toujours que ce n’est qu’à partir de l’âge de 65 ans que l’on pouvait vraiment bien faire les choses, et que l’on était libéré. Quelques faits saillants témoignent d’un contrôle total et d’une grande profondeur. Le travail au monastère de Hauterive près de Fribourg en Suisse a été pour lui une véritable purification. Je pense aussi au jardin du New Jersey, ludique, peu orthodoxe et puissant à grande échelle. Intimement formel, mélangé avec des gestes de paysage puissants. Mais aussi des jardins privés à Kapellen, Aubonne ou St Rémy, très lyriques et pleins d’atmosphères changeantes. Il était intuitivement capable de passer en douceur de l’ascèse totale retenue à une corne d’abondance sauvage et riche. Tout est plein de tempérament !