Henri Le Sidaner/Un peintre dans le jardin

Il y a 80 ans, le 16 juillet 1939, le peintre postimpressionniste français Henri Le Sidaner s’est éteint. Il est nettement moins connu que Claude Monet avec lequel il partageait une passion pour les jardins. Le jardin de sa maison de Gerberoy a été restauré il y a quelques années et a été officiellement labellisé « Jardin remarquable ».

En 1901, par l’intermédiaire de son ami le sculpteur Auguste Rodin, Le Sidaner loue une maison de villégiature à Gerberoy, un petit village médiéval de l’Oise situé entre Beauvais et Amiens. Succombant au charme du village endormi, trois ans plus tard, il fait l’acquisition de la maison qui était, en réalité, un ancien monastère attenant à l’église et entouré d’un grand verger. Au fil des années, il agrandit sa propriété et y aménage peu à peu un grand jardin qui, comme celui de Claude Monet, deviendra une source d’inspiration importante pour ses tableaux.

Contrairement à Monet qui, à Giverny, planta principalement des plates-bandes colorées avec des fleurs aux couleurs vives, à Gerberoy, Le Sidaner a opté pour un jardin monochrome. Il a transformé l’ancien verger devant la maison en « jardin blanc », composé d’une pelouse centrale flanquée en bordure d’œillets blancs et de tulipes, et de talus garnis d’hortensias blancs et de rosiers blancs. S’inspirant des jardins baroques des îles Borromées du lac Majeur, dans le nord de l’Italie, il a utilisé les ruines de l’ancien château fortifié qui se trouvait derrière sa maison comme toile de fond pour l’aménagement d’un « jardin en terrasses à l’italienne », lui aussi planté d’une multitude de rosiers et d’hortensias et de nombreux cyprès pour rappeler l’Italie.

Sur la terrasse qui surplombe le jardin à l’italienne, Le Sidaner a installé un petit atelier estival, qu’il a lui-même conçu, et aménagé une pergola en orme. Une roseraie composée d’une collection de roses parfumées, en particulier dans les tons rose et rouge, complète l’ensemble. Au point culminant de la propriété, il a aménagé un jardin jaune et bleu réalisé avec des iris, des lys, des géraniums, des soucis et des pervenches.

 

À Gerberoy, Le Sidaner, le maître du paysage intime a développé son propre style : la table dressée. Alors qu’auparavant, il peignait principalement des paysages et des scènes urbaines intimistes au cours des quatre saisons, à Gerberoy, il s’est mis à réaliser des dizaines de natures mortes avec des tables dressées dans le jardin. Admiratif de l’œuvre de Le Sidaner, le poète belge Émile Verhaeren, souvent invité chez Gerberoy, a écrit : « Cet artiste réussit à évoquer le silence et c’est peut-être pour cette raison que ses toiles retiennent notre attention ».

Ces dernières années, le jardin a été soigneusement restauré par la petite-fille de Le Sidaner et ouvert au public en 2008. En 2013, le jardin a reçu le label officiel « Jardin remarquable », délivré par le ministère français de la Culture.

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