Grand Prix National du Paysage pour l’agence Folléa Gautier

Le Grand Prix national du Paysage a été attribué à l’agence Folléa-Gautier pour son travail réalisé sur l’Ile de la Réunion sur les lisières urbaines sur un site classé « réserve naturelle ». Le Prix spécial du Jury a été accordé à Rémi et Pierre Janin (agence Fabriques Architectures et Paysages) pour le Parc agricole de Vernand (Loire). Un travail sur le paysage rural et agricole effectué sur la ferme familiale où est installée l’agence depuis plus de 10 ans.

Le Grand Prix national du paysage a pour objectif de valoriser une démarche paysagère innovante à l’échelle d’un territoire. Présidé par le paysagiste Gilles Clément, ce prix qui avait été délaissé a été relancé par la ministre dans le cadre de son « plan d’actions national pour la reconquête des paysages et la place de la nature en ville.

Le jury a sélectionné dans les deux cas des projets de longue durée. C’est ce qu’a affirmé Gilles Clément en disant « que le travail du paysagiste ne se termine pas à la réception du chantier, il s’étend dans le temps avec les évolutions du paysage sur de nombreux critères ». Tout en soulignant que l’ensemble des dossiers en compétition étaient de très grande qualité, le président du jury a expliqué que, pour lui, les deux lauréats permettent de valoriser les différentes facettes du métier : esthétiques, écologiques, pédagogiques.
Les Lisières de la Réunion

Le Grand prix national du paysage 2016 revient à l’agence de paysagistes Folléa Gautier (Bertrand Folléa et Claire Gautier). Avec l’appui du conseil régional de la Réunion, ils ont réussi à définir des orientations paysagères ambitieuses pour la côte ouest de l’île et à les concrétiser dans les franges urbaines de la commune de Saint-Paul. Les aménagements réalisés autour de l’autoroute ont permis aux réunionnais de se réapproprier leurs lieux de vie : doublement de la chaussée royale pour accueillir des voies piétonnes et un trafic routier apaisé, création de cheminements doux pour relier la ville à des sites naturels, recréation de milieux humides et restauration de la biodiversité.

Conscient de l’importance de préserver les richesses de l’île de La Réunion, le territoire de la côte ouest vit depuis 20 ans une expérimentation innovante et continue en matière paysagère. Cultivant l’esprit d’île-jardin, la Région a engagé des démarches de plan de paysage et de charte de qualité paysagère qui ont permis de donner les grandes orientations en matière d’aménagement du territoire.

Lorsque la région a engagé la réalisation de la route des Tamarins, elle a fait appel à des paysagistes, Claire Gautier et Bertrand Folléa, pour réinventer la relation de la ville de Saint-Paul à ses espaces de nature. C’est ainsi que le projet de lisière urbaine a été réalisé, dans lequel la route des Tamarins apparaît comme une occasion de redonner à voir le paysage.

Le projet repose sur 3 principes :

• Réduire l’impact de l’échangeur routier grâce à un dessin plus léger permettant de mixer voies automobiles et cheminements doux ;

• Rendre le site classé de Bernica plus visible et accessible grâce à la création d’une promenade urbaine le reliant au centre-ville de Saint-Paul ;

• Requalifier la Chaussée Royale en avenue d’accès à la ville et au littoral balnéaire : doublement de l’avenue, plantations, trottoirs élargis côté ville, terre-plein central, création d’une promenade piétonne le long du canal.

Ce projet illustre une collaboration longue et nourrie entre maîtrise d’ouvrage et maîtrise d’œuvre, depuis la définition des orientations paysagères jusqu’aux opérations d’aménagement et de transformation des lieux.

 

Le Grand prix national du paysage récompense l?agence Folléa Gautier pour les Lisières de la

Une promenade logée sous l?autoroute redonne un accès facile à la ravine de Be

Folléa Gautier – Une promenade logée sous l’autoroute redonne un accès facile à la ravine de Bernica.

 

Nouveaux modèles agricoles
Le Prix spécial du Jury a été accordé à Rémi et Pierre Janin (agence Fabriques Architectures et Paysages) pour le parc agricole de Vernand (Loire). La démarche est astucieusement intégrée au modèle économique de l’entreprise agricole. Fins connaisseurs de cette exploitation familiale comme de la demande sociale, les paysagistes ont construit avec le chef de l’exploitation un projet qui est source de valeur ajoutée pour les deux métiers.

Pour Pierre et Rémi Janin, tout projet agricole est nécessairement un projet de paysage. L’agriculture doit être capable de proposer des formes de paysage affirmées contemporaines et nouvelles. Elle doit également être le moteur d’une campagne partagée dans un contexte de plus en plus urbain.

La ferme d’élevage de Vernand est une exploitation élevant 45 vaches et 85 brebis pour la production de viande. Elle valorise ces productions en vente directe depuis 1989 et est en agriculture biologique depuis 1992. L’exploitation se répartit actuellement sur 4 sites différents représentant une surface totale d’un peu plus de 110 hectares. Le site principal où se trouve l’essentiel des bâtiments (habitations, bâtiments d’élevage et de stockage, transformation et de la viande et vente directe) se trouve à Vernand et compte 56 hectares. Un autre site d’une trentaine d’hectares est loué à 4 km, composé de pâturages à vaches et prés à foin. Des pâturages se trouvent dans le Rhône, sur la commune d’Eveux à 40 km, en site périurbain à 20 km de Lyon. Une partie des génisses et moutons y est mise en période estivale. Enfin, un site d’estive pour génisses de 13 ha se trouve dans les Monts du Forez, espace d’altitude (1200 m).

Le projet consiste à s’appuyer sur les outils du paysage pour optimiser les ressources naturelles et agricoles de la ferme. La technique de l’observatoire photographique du paysage a notamment été utilisée pour mieux comprendre les processus de transformation à l’œuvre. Il s’agit de photographier régulièrement un même lieu, d’un même point de vue, afin de percevoir les évolutions des paysages dans le temps.

La démarche de projet a été de saisir, de révéler et d’optimiser d’abord un projet d’espace agricole, en comprenant ses dynamiques et ces processus de constructions. L’analyse du système spatial agricole a ainsi conduit à modifier le corps bâti, à réutiliser et à transformer les bâtiments délaissés au fur et à mesure des évolutions agricoles (anciennes étables entravées, anciennes granges, appentis inutilisés). Le but a été de mettre en lien les bâtiments d’élevage et de stockage avec les espaces extérieurs avec lesquels ils fonctionnent. Le système actuel de plein air pour les bovins (les vaches restent dans les pâturages toute l’année) a supposé également d’éclater les bâtiments de stockage de foin, en le stockant là où il est produit l’été et donné l’hiver aux troupeaux au lieu de le ramener sur le site central, créant ainsi des sortes de «fabriques agricoles».

De même, les espaces extérieurs ont été redessinés. Les cultures, jusque là constituées de deux grandes parcelles de cinq hectares alternant tous les trois ans (3 ans en triticales et seigle et 3 ans en prairies temporaires permettant de réazoter naturellement le sol) ont été découpées en neuf fines bandes parallèles aux courbes de niveaux pour permettre de limiter l’érosion tout en maintenant un espace ouvert.

Des arbres isolés ont été plantés sur les limites des bandes, perchoirs à oiseaux contre les nuisibles, aucune haie n’a été à l’inverse installée pour conserver ce rapport aux horizons et jouer sur l’ouverture vivante de cet espace. Des chemins d’exploitation provisoires sont mis en place, permettant au printemps de rejoindre la vallée ou sont mise les vaches alors que les versants les plus hauts servent à la production de fourrages. Ils deviennent temporairement de nouvelles traversées dans la campagne, connectés aux chemins de randonnée.

L’ensemble du projet se veut ainsi d’optimiser un espace agricole tout en affirmant des images nouvelles et contemporaines d’architectures et de paysages agricoles. Il se base sur une logique d’économie en valorisant des éléments souvent issus de la récupération propres aux logiques agricoles (baignoires, pneus, planches de bardages, tuyaux béton, etc.).

La volonté est dans ce sens de construire et mettre en valeur un espace agricole contemporain, conçu à partir de ses logiques productives. Elle est à partir de là que cet espace puisse être support d’appropriations extérieurs et notamment urbaines dans une campagne de plus en plus partagée. Ainsi l’espace de stockage de foin, vide au printemps, devient à cette période un espace de spectacles avant de se remplir à nouveau au début de l’été de bottes de foin. Les chemins sont traversables à certains moments de l’année, les prés peuvent être ouverts lorsqu’ils sont vides.

Sur le site en périurbain, à près de 40 kilomètres, la présence de terrains constructibles à amené à imaginer une construction hybride entre pâturages et habitations. Les logements sont regroupés en blocs autour d’un pâturage central. Les moutons y sont amenés pendant la période estivale et entretiennent cet espace. L’hiver lorsqu’ils ne sont plus là, le pâturage devient un espace collectif.

Enfin, l’exploitation essaye de développer des mises en place d’estives urbaines, en emmenant des moutons l’été en ville, à Lyon, dans des espaces privés. Le but est ainsi de valoriser des espaces inutilisés en ville, et de permettre d’associer les processus agricoles aux constructions urbaines, en imaginant les moyens d’un urbanisme agricole.

 

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