Cimetières : des espaces verts en mutation

Pour faire des cimetières des lieux agréables afin de se recueillir ou de se promener, de plus en plus de villes font le choix de la végétalisation. Cogérés avec les familles des défunts, ces espaces font l’objet de problématiques spécifiques d’entretien avec le développement du zéro-phyto.

La Toussaint sera l’occasion comme chaque année de voir les cimetières refleurir. Mais en dehors de ce fleurissement traditionnel, et parfois éphémère, les cimetières restent en majorité des espaces minéraux avec des sols en sable, en gravillon ou en enrobé. Quelques communes font toutefois le choix de les végétaliser. Quelles raisons expliquent la renaturation de ces lieux de commémoration ?

« Une mission d’accompagnement du deuil »
« Derrière la notion de paysage, la notion très importante à défendre c’est l’accueil. Leur concession pour les familles, c’est un peu chez eux, avec un lien affectif très fort. », explique Marc Houdon, chef du service funéraire d’Angers. « Nous avons une mission d’accompagnement du deuil et le cimetière doit être un lieu agréable, un lieu de recueillement.»

Mais cette végétation n’est pas destinée uniquement aux familles des défunts. À Versailles, le cimetière des Gonards est prisé par les riverains à l’occasion d’un pique-nique, d’un après-midi lecture ou d’une promenade à travers ses 14 hectares de forêt. En temps de canicule, cette activité ne s’est d’ailleurs pas affaiblie, le cimetière végétalisé offrant un espace de fraîcheur. « Les arbres permettent d’atténuer la chaleur produite par les tombes, à la composition très minérale », explique Cathy Biass-Morin. Repenser les cheminements, drainer les sols humides ou encore planter des arbres et des plantes vivaces peuvent ainsi modifier considérablement le paysage d’un cimetière et le faire se rapprocher de celui d’un parc, avec sa diversité végétale et animale.

Des espaces cogérés avec les familles
Bien que le cimetière soit considéré comme un espace vert, les enjeux de son entretien s’avèrent plus complexes que celui des autres espaces publics, car impliquant différentes parties prenantes. « Les cimetières sont des espaces morcelés, constitués d’espaces privés – les sépultures que les particuliers louent pour trente à cinquante ans –, où les agents n’ont pas le droit d’intervenir, et les espaces publics, c’est-à-dire les terrains communs, les cheminements et leurs abords », explique Cathy Biass-Morin. Il n’est pas rare que les concessions familiales deviennent de véritables friches, négligées par les familles du fait d’un manque de temps ou de l’éloignement. Or, l’entretien est indispensable. En son absence, des monuments funéraires peuvent se détériorer et constituer un risque de chute, notamment pour les personnes âgées. De plus, la flore spontanée peut s’installer et certaines espèces envahissantes, comme la vergerette du Canada ou la renouée du Japon, prendre racine dans les interstices des monuments et essaimer des graines ailleurs dans le cimetière. Certaines collectivités prennent la décision d’entretenir les espaces privés dès lors que les friches représentent un danger.

Des lieux de transition écologique
La transition vers une gestion écologique n’est pas sans conséquence, alors que les surfaces minérales laissent place à l’enherbement, lequel n’est pas toujours bien perçu par les familles. L’absence de produits phytosanitaires entraîne en effet le développement d’une végétation spontanée qui peut faire naître un sentiment d’abandon et de non-respect de la mémoire des défunts.

Le tout, c’est surtout d’accepter la spontanéité florale… nos ancêtres ont procédé sans produits phytosanitaires au sein des cimetières pendant plus de 1900 ans, pourquoi pas nous ? » insiste Cathy Biass-Morin.

Pour en savoir plus, consulter le guide « Paysage et entretien des cimetières » de Plante & Cité.

PHOTO: Le cimetière des Gonards, à Versailles, a été primé pour sa politique de végétalisation. © Plante & Cité / Sandrine Larramendy 2016.

Source: citeverte.com